Il ne s’agira pas de mon plus long et plus lointain voyage, mais parfois il suffit d’un contexte et d’une ambiance particulière pour vous transporter plus loin que toutes autres expéditions.
Le contexte
J’ai 35 ans. Ja partage ma vie avec Fanny, ma femme, avec qui nous avons une adorable fille, Lou, âgée de 18 mois lors de mon voyage.
Après 11 années de carrière au sein d'un groupe d'ingénierie du bâtiment, comme ingénieur, puis associé et enfin directeur d’agence, j’ai pris la décision de bifurquer du (mauvais) chemin que je commençais à prendre pour revenir sur un chemin plus sein et en adéquation avec mes valeurs.
Depuis mon arrêt fin septembre 2022, j’ai appris à retrouver goût à une action que l’on perd souvent dans nos vies effrénées : « prendre le temps ».
Prendre le temps de réfléchir, de lire, de se documenter, et surtout, prendre le temps de m’ouvrir sur des réflexions sociales, politiques et environnementales, que j’avais malheureusement trop mis de côté ces onze dernières années.
J’ai également eu le temps de me nourrir de retour d’expérience et de faire connaissance avec des personnes qui, comme moi, avaient bifurqué de leur vie professionnelle afin de retrouver plus de « sens » dans leurs vies.
Ces sujets de « quête de sens » et de bifurcation professionnelle, dont on entend beaucoup parlé ces dernières années, notamment depuis le COVID en 2020, m’ont intéressé.
Via mes lectures et mes rencontres, j’ai alors commencé l’écriture de notes, d’idées et de réflexions. Petit à petit et mis bout à bout, un scénario est né : celui d’un film documentaire.
Alors que mon expérience en audiovisuel se résume aux montages vidéos que je réalisais adolescent sur la première version de Movie Maker, j’ai repensé à la chanson Note pour trop tard d’Orelsan « Si tu veux faire des films, t’as juste besoin d’un truc qui filme ».
Je me suis dit « Et pourquoi pas finalement ? ». Pourquoi ne pas essayé de réaliser ce documentaire? Je n’avais rien à perdre, mis à part du temps, que j’avais justement.
Mon cerveau était en plein ébullition. J’ai alors senti le besoin de me retrouver seul pendant un moment afin de remettre de l’ordre dans mes idées.
J’ai demandé à mon épouse si elle était d’accord pour que je quitte le cocon familiale pendant 7 jours. Une semaine pendant laquelle elle gérerait la petite, matin et soir, en parallèle de son travail la journée.
Elle n’a pas hésité une seconde et m’a tout de suite répondu positivement.
En lisant ces lignes, certain.es diront probablement « Bah ils se fait pas chier celui-là ! Une semaine à laisser sa femme gérer seule la maison pendant une semaine alors qu’elle bosse ». Alors que d’autres diront peut être « Bah, c’est normal quand même de pouvoir prendre du temps pour soit. Une semaine en plus c’est pas si long. Et les femmes avant, elles se débrouillaient bien à tout faire seule avant à la maison ».
Quoi qu’il en soit et quoi que les gens pensent, je lui en suis encore extrêmement reconnaissant aujourd’hui.
Une fois que j’ai su que je pouvais prendre 7 jours pour moi et moi seul. Il ne m’a pas fallu plus d’heure pour réfléchir quel type de parenthèse je souhaitais m’accorder.
Mon brainstorming a ressemblé à ça : « Pas d’avion, que du train, sac à dos, randonnée, grands espaces, nature, montagne, lac, pub, moquette et dépaysement…. »
Ecosse, me revoilà !
L’ambiance particulière
Je suis déjà allé quelques fois en Écosse.
La première, comme étudiant Erasmus de septembre 2010 à juin 2011.
La seconde en 2017, lors de vacances familiales avec ma belle-famille, afin de retrouver Benoit, mon beau frère, également étudiant là-bas.
Je suis tombé amoureux de ce pays grâce à sa culture, son histoire, la gentillesse des Ecossais, ainsi que par les espaces si sauvages et uniques des Highlands.
L’ambiance particulière est là !
Les Highlands ont, selon moi, l’avantage de réunir l’Irlande, la Bretagne et les Alpes dans une même région. Les paysages sont somptueux, parfois même à couper le souffle. Les nuages disparaissent aussi vite qu’ils sont apparus, laissant derrières eux l’immensité de la flore et des couleurs éclatantes: le rouge de la spaigne, le vert et les premiers jaunes-orangé des arbres en automne, le noir sombre des profondeurs mystiques des lacs, le gris des rochers et le blanc des sommets.
Les montagnes Ecossaises me font penser à des volcans dans lesquelles de l’eau jaillirait à la place de la lave.
Je n’ai cessé de penser à l’Ecosse.
Pendant mes nuits d’insomnies, très probablement liées à mon travail, Fanny me murmurait « Ferme les yeux, respire et pense à l’Ecosse. Pense à une petite maison, au bord d’un lac, avec une vue sur la montagne en face ».
L’occasion était donc trop belle pour rater ce voyage.
Je confirme donc mon choix initiale d’aller en Ecosse et décide de faire une partie de la West Highland Way à pied.
L’organisation
Ne souhaitant plus prendre l’avion, ou du moins, le limiter au maximum tant que possible pour limiter mon impact carbone, j’ai souhaité rejoindre l’Ecosse en train depuis Lyon.
J’organise mes 7 jours de cette façon :
Jour 1 : Train Lyon - Londres (avec une étape à Lille pour prendre l’Eurostar)
Jour 2 : Train Londres - Edimbourg. Puis bus Edimbourg - Crianlarich
Jour 3 : Randonnée Crianlarich - Bridge of Orchy
Jour 4 : Randonnée Bridge of Orchy - Kinlochleven
Jour 5 : Randonnée Kinlochleven - Fort William. Puis bus Fort William - Glasgow
Jour 6 : Journée à Glasgow
Jour 7 : Train Glasgow - Lyon (avec deux étapes à Londres et Paris)
La West Highland Way
La West Highland Way est un sentier de randonnée pédestre reliant Milngavie, proche de Glasgow, à Fort William.
C’est une des randonnée les plus connues et emblématiques de la Grande-Bretagne.
Elle traverse une partie des Highlands sur 154km et 2870 D+.
Les habitués des Alpes devraient trouver l’itinéraire plutôt simple d’un point de vue technique.
Toutefois, bien que les montagnes Ecossaises soient moins élevées que leurs consoeurs Alpines, elles n’en restent pas moins impressionnantes.
Les paysages et reliefs des Highlands donnent parfois l’impression d’être situés entre 1500m et 2000m d’altitude alors que la West Highland Way culmine seulement entre 0m et 600m.
On y croise des lacs, des rivières, des cascades ainsi que des cervidés (les plus chanceux verront peut être des cerfs).
En plein été, il faut également s’attendre à vivre avec les midges, ces petits moustiques, réputés pour être la plaie de l’écosse.
Le point culminant de l’Ecosse est le Ben Nevis, dans les High Land, et s’élève à 1345 m d’altitude.
La West Highland Way passe juste à côté lors du dernier tronçon Kinlochleven - Fort William, le sommet est donc visible, à condition que celui-ci ne se planque pas derrière les nuages, ce qui arrive régulièrement souvent.
L’aller-retour jusqu'à son sommet peut se faire dans la journée depuis Fort William. Il faut toutefois noter que la ville se trouve au bord de la mer, donc altitude 0, soit un dénivelé positif de ….1345 D+.
La West Highland Way se fait généralement entre 7 et 8 jours complets.
De mon côté, en 7 jours (compris transports), je ne pouvais donc pas prévoir de faire le parcours entièrement.
Après quelques recherches, je décide de commencer à Crianlarich, entre Inverarnan et Tyndrum, presqu' à la moitié du parcours au 73ème kilomètre.
« Si tu ne vois pas le sommet de la montagne, c’est qu’il pleut. Si tu vois le sommet de la montagne, c’est qu’il va pleuvoir », dictons Ecossais.
Matériel
1 - Veste imperméable The North Face Storm Jacket
(Primordiale en Ecosse)
2 - Casquette Patagonie
(Très utile pour se protéger de la pluie afin d’éviter les gouttes directement sur le visage)
3 - Sac congélation pour protéger les objets importants de la pluie (passeport, porte-feuille, portable…)
4 - Bâtons de marche (J’ai hésité mais j’ai bien fait de les prendre !)
5 - Doudoune The North Face
6 - Serviette microfibre (pas utilisée car finalement hôtel tous les soirs)
7 - Collant décathlon laine Merinos (Très utile pour un mois de novembre)
8 - 1 T-Shirt Technique manche courte synthétique
9 - Pantalon de pluie décathlon (très utile)
10 - Trousse de toilettes et à pharmacie
11 - T-shirt manche longue laine mérinos (porté tous les jours, plus que pratique)
12 - Liseuse + chargeur (très pratique)
13 - Poche à eau
14 - Trepied portable pour prise de vue
15 - 2 pantalons randonnée hiver Quechua Decathlon
(1 seul aurait largement suffit. J’aurais dû remplacer le deuxième par un jogging)
16 - Guêtres
17 - Gants hiver Décathlon
18 - Buff tour de tête en rouge et tour de coup en noir
19 - Caleçons
20 - Deux paires de chaussettes randonnée hiver en coton
(j’aurais dû prendre des laines mérinos que je n’avais pas à l’époque)
21 - Sac de randonnée Quechua symbium Décathlon
22 - Adaptateur prise anglaise/française
23 - Frontale + piles
24 - Montre Garmin
25 - Ordinateur + chargeur (inutile. J’ai travailler uniquement avec mon téléphone)
26 - Barre énergétique + amendes
27 - Lunettes de soleil (complètement inutile)
28 - Carnet de note + stylos
JOUR 1 - LYON - LONDRES
En arrivant à Londres, je me rappelle dès la descente du train que ce n’est pas seulement l’Ecosse qui me fait vibrer, mais plus largement la Grande-Bretagne.
Les briques, les escaliers des immeubles et des maisons donnant directement sur les rues pavées, les devantures des pubs, les odeurs de fish and chips à chaque coin de rue….
A chaque fois, je me sens tout de suite bien dans cette capitale !
Je profite donc de cette étape pour m’échauffer les jambes et donner quelques kilomètres supplémentaires à mes chaussures de randonnée (presque) neuves.
J’ai toute une après-midi devant moi pour revoir quelqu’uns des quartiers et monuments les plus emblématiques de la ville : St Pancras, British Museum, Coven Garden, St James’s Park, Palais de Buckingham, Big Ben, Palais de Westminster, les quais de la Tamise, Cathédrale St Paul….
Une belle ballade de 20km au final.
Il me faudrait plus de jours pour profiter pleinement de la ville !
Mais chose promis chose due : je reviendrai avec mes parents, Fanny et Lou dès que nous en aurons l’occasion !
(Mon cadeau de Noël 2019 étant tombé à l’eau à cause du covid en 2020)
Après cette belle et longue marche, je me précipite vers un pub identifié un peu plus tôt sur internet.
J’y retrouve tout ce que j’aime dans un pub : de la moquette, du mobilier en bois, une cheminée, plusieurs colonnes à bières à faire pâlir celles de nos PMU et surtout, une ambiance chaleureuse.
Je m’installe à une table pour boire ma première pinte, accompagnée d’un type de cacahuètes qu’on ne trouve que là bas (laissez moi y croire !)
Je change ensuite de pubs pour reprendre une deuxième pinte accompagnée cette fois-ci d’un burger (Nota : Mon effort récent sur la réduction de consommation de viande s’est mis en pause pendant les 7 jours de mon séjour….).
Enfin, retour à l’hôtel pour une bonne nuit de sommeil.
Trains :
1/ Lyon - Lille - SNCF - 52€ avec la carte Liberté
2/ Lille - Londres - EUROSTAR - 89,5€
Hôtel :
Ambassadors Bloomsbury - 267,65€ la nuit avec pdj (Mon hôtel le plus cher et le moins bien de tout mon voyage…Les hôtels à Londres sont très chers)
Marche:
20km - 0D+
JOUR 2 - LONDRES - CRIANLARICH
Après une bonne nuit de sommeil, réveil à 7h pour petit-déjeuner puis filer à King’s Cross Station prendre mon train.
Mon parcours initiale prévoyait de faire Londres - Glasgow, avec un changement à Edimbourg. Puis prendre un troisième train entre Glasgow et Crianlarich (j’avais d’ailleurs choisi cette ville comme le départ de ma randonnée car elle possédait une gare).
Toutefois, mon premier train Londres - Edimbourg arrive avec plus de deux heures de retard et je rate donc l’ensemble de mes correspondances.
Rien de grave, je relativise, ne veux pas stresser, et passe un bon moment à échanger avec mes voisines, deux anglaises à la retraite qui partent visiter l’Ecosse.
Après avoir pensé un court instant passer la nuit dans la capitale Ecossaise, je trouve une solution de secours grâce à la liaison de bus Edimbourg - Oban qui fait un arrêt à …Crianlarich. Bingo !
Après 9h de train puis 2h40 de bus, j’arrive à destination, de nuit, dans cette petite bourgade, perdue au milieu des Highlands.
Le trajet est long, mais au moins, je serai sur place pour commencer ma randonnée dès le lendemain matin.
Après avoir marché quelques mètres en pleine nuit, le long de la route et sous la pluie, je trouve mon hôtel.
Je m’y sens bien dès les portes passées. On y retrouve la chaleur d’un poêle à bois et la convivialité d’un pub-restaurant dans lequel je mangerai.
J’étais assez inquiet que celui-ci soit fermé à mon arrivée tardive (vers 20h) car les Ecossais ont plutôt l’habitude de diner entre 17h et 19h (comme dans tout le Royaume-Unis d’ailleurs).
Une pinte, un burger (oui encore) et un bon dodo.
Une rando m’attend le lendemain.
Nota : Je voulais faire Londres - Glasgow en train direct en 4h30 (comme au retour) mais impossible de réserver un billet à l’avance sur internet (ni sur le site de la compagnie, ni sur Trainline). Je ne connais pas les raisons de ce problème mais j’ai préféré assurer mes arrières en prenant un train, plus long certes, mais que je pouvais réserver.
Trains:
Londres - Edimbourg - LNER - 95,58€ (compris le deuxième train Edimbourg - Glasgow que je n’ai pu finalement prendre)
Bus:
Edimbourg - Crianlarich - CITYLINK - 33,11€
Hotel :
Best Western The Crianlarich Hotel - 91€ le nuit avec petit-déjeuner
Marche:
0km - Uniquement les liaisons gare/gare et arrêt de bus/hôtel….
JOUR 3 - CRIANLARICH - BRIDGE OF ORCHY
Je n’ai pas très envi de m’attarder sur la description des paysages. Les photos parlent d’elles même, et n’étant pas écrivain, j’aurais dû mal à décrire mes émotions quand je traverse ces paysages magnifiques.
Cette première étape se passe très bien. Après avoir pris un bon petit-déjeuner Ecossais, je pars vers 7h45 de l’hôtel.
Je prends le temps de faire des photos et plusieurs plans vidéos.
La pluie m’accompagne une grande partie de la journée. Comme la départementale dans le fond de la vallée d’ailleurs…
Elle se fait très discrète, mais on entend quand même légèrement le bruit des pneus des camions et des voitures qui roulent sur l’asphalte mouillé.
J’arrive toutefois à me défaire complètement de ce petit bémol.
Les couleurs et les reliefs font plus travailler ma vue et mon esprit que le bruit, mon ouïe.
J’arrive finalement assez tôt à l’hôtel, vers 13h. La gérante est surprise de savoir que je viens de Crianlarich et que je sois déjà arrivé.
Personnellement, pour une première journée, ça me suffit largement.
En arrivant dans ma chambre, je remarque que la pluie s’accentue à l’extérieur.
C’est quand je m’allonge sur mon lit, en regardant le déluge qui s’abat sur les montagnes, que je me dis que j’ai bien fait d’opter pour l’hôtel plutôt que pour le bivouac…
Lorsque j’ai préparé mon voyage, j’ai un moment hésité à l'option tente. Dans un premier temps, pour sortir de ma zone de confort , et dans un second, pour faire des économies.
Sur ce second point, je me suis rapidement dit que je pouvais me faire plaisir. Après mes (presque) 11 années de carrière, je pars avec un petit pécule interessant, je veux donc en profiter ! Pour ce qui est de sortir de ma zone de confort, on repassera….
Quand je vois la pluie et le vent qui balayent la végétation, et, point important que j’avais omis :qu’il fait nuit à 15h30, je me dis que j’aurais eu l’air fin, seul dans ma tente, de nuit à 15h30, mouillé du matin au soir…
Définitivement : Je ne regrette pas l’hôtel, en tout cas pour cette saison de l’année !
Je passe donc l’après midi dans mon cocon à lire, écrire et regarder le paysage, puis descends assez tôt au pub de l’hôtel afin de m’y restaurer.
Souhaitant reprendre les bonnes habitudes, je décide de faire une pause avec la viande et de recharger les batteries en prenant des spaghettis avec une sauce aux légumes….
Ce ne fût pas une réussite. Ce soir là, mon ventre a été aussi agité que la tempête qui s’abattait à l’extérieur.
Comme quoi… ne jamais déroger à la règle.
Demain, je reprends burger, frites et pinte. On est en Ecosse !
Nota : Je ne mange pas les midis hormis quelques barres et amendes. Ça me couperait dans ma randonnée et je sais que la reprise après une pause casse-croute est toujours dure…Je préfère donc grignoter la journée et manger tôt le soir (vers 18h)
Hôtel :
Bridge of Orchid Hotel - 119€ la nuit avec petit déjeuner
Marche :
22,7km - 510 D+ - 5h10 (compris les pauses)
Aucune difficulté technique.
JOUR 4 - BRIDGE OF ORCHY - KINLOCHLEVEN
Bien que mon estomac soit encore assez patraque après cette nuit houleuse, je souhaite prendre un petit déjeuner pour ne pas partir le ventre vide.
Comme ce n’est plus la saison touristique, celui-ci n’est pas servi avant 8h….
Pour un randonneur, c’est donc long…très long. Surtout que l’étape qui m’attend est la plus longue des trois.
A 8h pile, je suis donc dans le restaurant de l’hôtel à commander mes oeufs, mon café et mon bacon (de la viande j’ai dit !).
J’arrive tout de même à partir vers 8h20 (un RGV - Repas à Grande Vitesse).
Beaucoup moins de pluie ce matin, ce qui n’est pas désagréable. Je quitte la vallée avec la route pour me retrouver pendant plusieurs dizaine de kilomètres dans la pampa Ecossaise, seul au monde.
Seul, presque. Je trouve sur mon chemin des groupes de cervidés. Des biches dans un premier temps, puis, mon coeur s’accélère, c’est bien un cerf que je vois au loin.
Nous nous scrutons, il ne bouge pas et continue de me fixer jusqu’à ce que je disparaisse de son champs de vision au prochain virage.
Ce fût un de mes moments préférés du séjour. Je rêvais de voir un cerf dans les Highlands, c’est chose faite. Quel animal remarquable !
Je redescends ensuite dans une autre vallée dans laquelle je retrouve la route nationale principale des Highlands.
Après l’avoir traversée, je tombe sur un hôtel, assez proche de la route mais tout de même assez en retrait pour s’y sentir isolé : le Kings House Hôtel.
Il est en bois, avec de grande baies vitrées, permettant probablement une vue incroyable sur la vallée.
Je regarde ma montre, 20km au compteur. Je me serais bien arrêté ici pour la nuit, à profiter de la vue à côté d’une cheminée, mais malheureusement, la suite de mon séjour est déjà programmé et réservé. Je ne peux donc pas faire d’entorse à mon programme. C’est tout le problème des séjours avec réservation…Ça laisse peu de place à l’imprévu.
Mais c’est comme ça. Je ne tergiverse pas longtemps et reprends ma route.
Il me reste encore 10km, je commence à être fatigué, et le soleil commence à péricliter.
Quelques kilomètres après l’hôtel, j’attaque une belle montée qui m’emmènera sur le point culminant de ma randonnée à 570 m d’altitude (j’entends les rires des aficionados des Alpes d’ici, calmez-vous !). Puis entame aussi sec la descente vers Kinlochleven pour rejoindre l’altitude 20m.
Au bout du 30ème kilomètre, pensant devoir être arrivé, je regarde mon parcours et me rends compte que ce n’était pas 30 mais 34km.
Les amateurs de randonnée le savent: 4km supplémentaires quand on a déjà les jambes lourdes, ce n’est vraiment pas agréable.
A ce moment précis je suis content d’être seul ! Je ne peux m’en prendre qu’à moi-même, avale ma salive et marche.
Accompagné, ces 4 derniers kilomètres aurait surement été…disons…folklorique.
J’arrive à la nuit tombée dans mon B&B tenu par un particulier.
Il n’attendra pas 5 minutes pour me dire qu’il adore la France, qu’il y est déjà allé et me dit en français avec un fort accent British « Bonjour les amis ! J’adore le fromage ».
Contrairement aux hôtels, je ne peux pas me mettre à l’aise et descendre au pub en chaussettes.
Je suis obligé de renfiler mes chaussures légèrement mouillée et d’affronter à nouveaux la pluie, les guiboles raides comme des piquets, pour aller jusqu’au pub, à une centaine de mètres.
Je suis déjà allé dans celui-ci avec ma belle famille lors de mon dernier séjour.
Un pub assez ordinaire mais je ne sais pas pourquoi, j’aime bien cette adresse !
A noter qu’ils ont de la John Smith en pression, un délice !
Cette fois-ci je ne me fais pas avoir ! Burger (même deux), frites et une pinte (même deux) de John Smith.
Je suis au lit vers 20h et ne me fais pas prier pour m’endormir une nouvelle fois sur ma liseuse.
Hôtel:
The Bank House - B&B Particulier - 121€ la nuit avec petit déjeuner
Marche:
34,5 km - 953 D+ - 7h53 (pauses comprises)
Aucune difficulté si ce n’est la distance un peu longue et le col à passer en fin de journée.
JOUR 5 - KINLOCHLEVEN - FORT WILLIAM
Après un bon Scottish breakfast servi par mon hôte, je reprends mon chemin à 7h30.
Pas le temps de s’échauffer, j’attaque directement par du dénivelé positif pour rejoindre les derniers cols avant de redescende jusqu’à Fort William.
Devant moi, le Ben Nevis, le plus haut sommet d’Ecosse ! Enfin….Je l’imagine, car celui-ci est complètement caché dans les nuages. Je vois juste ses premiers mètres d’altitude qui le rende impressionnant. Une masse noire, abrupte, qui perce la couche nuageuse.
Au loin, je vois le sentier permettant de rejoindre son sommet et regrette une nouvelle fois que le temps me soit compté. J’en aurais bien profité pour essayer de le gravir.
Peu importe, je reviendrai !
Entre Kinlochleven et Fort Williams, sur les hauteurs, j’ai pris la pluie de la semaine, voir de l’année.
Celle-ci semblait me dire « Tu dis à tout le monde que tu es content de ton matériel technique? Que tu restes au sec toute la journée ! Bah on va voir tiens, t’as jamais connu une vraie pluie Ecossaise mon gars. » (oui à ce moment, je faisais parler la pluie ).
Et bien au grand désespoirs de celle-ci, je persiste et signe : Je suis content de mon matériel technique. Et oui je reste au sec toute la journée !
Sauf…sauf quand au 18ème kilomètre je décide de mettre mes guêtres car « je ne les avais pas utiliser de mon séjour » et que « je voulais les essayer ».
Sur ce coup là, j’aurais mieux fait d’avoir une autre idée de génie. Car pendant la pluie suivante, presque aussi violente que la précédente, celle-ci se glisse entre mon pantalon de pluie et le maintien de la guêtre, se dirigeant droit dans mes chaussures !
J’ai donc passé les 6 derniers kilomètres les pieds trempés et froids. Pas très agréable, donc.
L’arrivée à Fort William est très plate, sur une route bétonnée. Je sais qu’à l’arrivée un panneau indique que la West Highland Way est finie et nous félicite pour l’avoir accomplie.
Pour être honnête au fond de moi, je m’attendais un peu à une arche en bois énorme, un pub à côté, des gens qui applaudissent et le maire du village qui vient me serrer la main pour me dire « Yeah Guy ! Good Job ! »
Rien de tout ça…un petit panneau bleu aussi gros que ceux des « Villages fleuris » me fait comprendre que ça y est, ma randonnée est terminée.
Marche:
24 km - 676 D+ - 5h34 (pauses comprises)
Aucune difficulté.
JOUR 5 (SUITE) - FORT WILLIAM - GLASGOW
Comme je souhaitais prendre une journée complète pour me balader dans Glasgow, je décide de prendre un bus dès mon arrivée à Fort William afin d’être sur place dès le mercredi soir.
Avant ça, je passe dans un magasin de sport pour m’acheter deux paires de chaussettes de randonnées 100% laine mérinos Ecossaises. Dommage qu’elles arrivent à la fin de ma randonnée…En tout cas je ne les quitte plus depuis novembre.
Mon bus longe le Loch Linnhe puis empreinte la vallée de Glencoe dans laquelle je suis passé la veille pendant ma randonnée. Même en bus, j’arrive à être bluffé par le panorama.
Le Loch Linnhe est appelé « Loch » mais il s’agit de la mer. L’air iodé que nous sentons avant de prendre le bus nous le rappelle.
J’essaye désespérément de prendre des photos depuis le bus mais je sais d’avance qu’elles ne rendront rien.
Là, nous passons devant une petite maison, au bord de la mer, avec une montagne en face. Je la prend rapidement en photo en me disant que c’était peut être celle-là, la fameuse maison dont Fanny me parle pour m’aider à me rendormir pendant mes insomnies. En tout cas je me vois bien, installé ici, avec ma petite famille.
La route est longue, environs 3h20, et surtout sinueuse lorsqu’on longe le Ben Lomond.
Bien que je sois installé au premier rang du bus, je suis blême et obligé de fermer les yeux pour ne pas vomir (je suis assez malade en transport, surtout quand ce n’est pas moi qui conduit….)
Nous arrivons à Glasgow à 17h30.
Je suis comme un enfant qui arrive à DisneyLand
J’ai le visage collé aux carreaux du bus pour essayer de reconnaitre chaque coin de rue arpenté quand j’étais étudiant ici.
Mon hôtel est très proche de la station du bus.
Il est classe. Etre arrivé dès le mercredi soir apporte l’avantage et le confort de m’y installer pour deux nuits complètes.
Après une bonne douche, je renfile doudoune et chaussures, prêt à arpenter les rues de la ville pour une bonne soirée Ecossaise.
Bus :
Fort William - Glasgow - CITYLINK - 32,33$
Hôtel:
Maldron Hotel Glasgow City - 230€ pour deux nuits compris petit-déjeuner
JOUR 6 - GLASGOW
Ma soirée fût bonne ! J’ai rencontré et sympathisé avec un groupe d’Ecossais avec qui j’ai fini la soirée dans un pub/club.
Quand on dit « finir la soirée en Ecosse » on parle d’1h du matin en général, heure la plus tardive à laquelle ferment certains pubs (23h pour la majorité).
Il y a également quelques boites de nuits qui ferment plus tard mais ce n’était pas mon but, voulant profiter de la journée du lendemain.
Je me réveille tout de même vers 9h et enchaine sur l’énorme buffet de l’hôtel afin de prendre des forces et éviter le repas du midi.
Je sors ensuite dans les rue de Glasgow, direction, le West End, pour aller dans mon ancienne université.
Bien que je la connaisse par coeur, je suis toujours émerveillé par celle-ci.
Je remonte ensuite Aston Lane, rue très animée les soirs en semaine et weekend, juste à côté de mon ancien appartement.
J’en profite pour faire une photo de celui-ci et l’envoyer à mes anciens colloques, afin de prendre de leurs nouvelles.
Je descends ensuite dans le sud de la ville visiter des quartiers moins connus mais que je souhaitais visiter car de nouveaux programmes immobilier avaient été construit récemment. Comme l’architecture et le bâti en général m’interessent, je souhaitais voir ces nouvelles construction.
Je remonte ensuite Byres road vers le nord, et atteint la dernière adresse que je souhaitais faire pendant mon séjour: Oran Mor. Une église transformée en pub restaurant.
Il est 18h. Je mange mes derniers onion rings accompagnés de ma dernière pinte et savoure mon dernier moment écossais.
Je prends ensuite le métro (le plus ancien du monde après Londres et Budapest), qui me ramène quasiment en bas de mon hôtel.
Mon train est à 6h le lendemain, direction Londres. Je me couche donc tôt.
Le goût amer de quitter ce pays dans lequel je me sens si bien est vite rattrapé par la joie de retrouver Fanny et Lou dès le lendemain.
Au fond de moi je me dis « peut être qu’un jour nous vivrons ici, avec ma famille ».
Je ne sais pas de quoi est fait l’avenir.
Je ne sais pas si un jour, nous vivrons ici, et à vrai dire, peu importe, ce n’est pas la question.
Toutefois, je sais que je reviendrai. Une fois, deux fois, trois fois, peu importe. Mais je continuerai de venir dans ce pays aussi longtemps que cette petite maison au bord de la mer en face de la montage pourra me faire dormir.
A Fanny, je souhaite te dire merci.
Merci de m’avoir permis de prendre une semaine pour moi, seul. Tu le sais, je ne pourrais que t’encourager à faire autant !
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